Le lavement des pieds, un geste d’humilité incarné par Jésus dans l’Évangile de Jean, est bien plus qu’un simple acte d’hospitalité. Jacques Nussbaumer, professeur de théologie systématique, analyse la profondeur spirituelle et historique de ce geste. Cet épisode, survenu lors du Jeudi saint, marque la transition entre les « signes » de Jésus et sa passion imminente. À un moment où les disciples s’attendent à un geste d’accueil traditionnel, Jésus brise les codes sociaux en accomplissant un acte réservé aux serviteurs les plus humbles. Ce lavement des pieds devient ainsi un symbole de renversement des hiérarchies sociales et une invitation à une humilité radicale.

Le lavement des pieds, bien que pratique courante dans le Proche-Orient ancien pour accueillir les voyageurs, devient ici un acte sacré, préfigurant le sacrifice ultime de Jésus à la croix. Jacques Nussbaumer souligne que ce geste n’est pas uniquement une leçon d’humilité personnelle, mais une révélation du rôle rédempteur de Jésus : purifier ses disciples du péché à travers l’acte de service ultime, celui de mourir pour eux. Ce geste s’inscrit dans une perspective de salut, une purification qui dépasse la simple propreté physique.

Néanmoins, l’acte du lavement des pieds n’a pas été reconnu universellement comme un sacrement. Si des traditions comme les Ménonites et les Adventistes le pratiquent, il n’a pas été institué au même titre que le baptême ou l’Eucharistie. L’absence de ce rituel dans les Évangiles synoptiques et son caractère unique dans l’Évangile de Jean expliquent en partie cette absence de sacralisation. Pour Jacques Nussbaumer, ce geste va au-delà du symbolisme et doit être vu comme un acte d’engagement conscient et volontaire, une tendresse robuste, prête à aller jusqu’au bout, comme le Christ lui-même.

Aujourd’hui, l’application de ce « sacrement de la tendresse » peut se retrouver dans l’action humanitaire. Jacques Nussbaumer suggère que prendre soin des plus vulnérables, qu’il s’agisse de blessés ou de personnes rejetées, incarne le véritable esprit de ce geste chrétien. Le lavement des pieds, loin d’être une simple tâche symbolique, devient ainsi un modèle d’amour sacrificiel et de service désintéressé envers les autres, un appel à suivre l’exemple de Jésus dans le monde contemporain.

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Entretien mené par : David Gonzalez
Réalisation : Horizontal pictures
Intervenant : Jacques Nussbaumer