L’évangile du dimanche 13 octobre

Marc 10.17-30 – Jésus et le jeune homme riche

Introduction

Dans sa montée à Jérusalem, Jésus aborde les différents points de la vie chrétienne qu’il relit à la lumière de la croix. La semaine dernière, nous avons abordé la question de la conjugalité, dans ce récit, la rencontre avec un homme riche lui donne l’occasion de prolonger son enseignement sur l’argent et les richesses.

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

Titre : Le riche, un paroissien modèle 

Le riche qui ses présente à Jésus est un homme exemplaire. Il est riche, il obéit à tous les commandements, il est concerné par la question de son salut et il n’hésite pas à s’agenouiller aux pieds de Jésus. Comme riche, il est dans la maîtrise de sa vie, il veut aussi être dans la maîtrise de son salut… c’est là qu’il va se trouver en échec.

Titre : L’humour de Jésus

Les Pères de l’Église ont souligné que dans les évangiles, on voyait Jésus pleurer, mais on ne le voyait jamais rire. Peut-on penser que lorsqu’aux noces de Cana, il a changé l’eau en bon vin alors que l’assemblée avait déjà bien bu, il soit resté triste et sérieux ? Quand il parle d’une poutre dans un œil, d’une passoire à filtrer les chameaux tout en laissant passer les moucherons et d’un chameau qui essaye de passer par le trou d’une aiguille, on voit qu’il sait manier l’humour. Par cette comparaison humoristique, il nous dit quelque chose de très sérieux sur le caractère totalitaire de l’argent.

Pistes d’actualisation

1er thème : La logique de l’argent

Si l’homme riche se trouve en impasse, c’est qu’il est prisonnier de son argent, ce qui l’empêche d’être disponible pour l’Évangile. Il faut dire que l’argent et l’évangile obéissent à deux logiques qui sont en tous points contradictoires.

La dynamique de l’Évangile est un appel au don, au partage et à la gratuité alors que la logique de l’argent est celle de l’accumulation, de l’achat et de la vente au meilleur prix. Entre les deux démarches, la contradiction est irréductible. L’Évangile accentue cette opposition en donnant un nom à l’argent, Mamon (Personne ne peut servir deux maîtres… vous ne pouvez servir Dieu et Mamon : Mt 6.24), ce qui revient à l’inscrire dans le registre du démoniaque.

Le démoniaque, c’est ce qui prend possession de notre liberté et tout le thème de ce passage est bien la tension entre la liberté et les richesses.

2e thème : Un disciple en impasse

Lorsqu’il demande au riche de donner tous ses biens, Jésus utilise la même démarche que lorsqu’il radicalise les commandements dans le sermon sur la montagne quand il déclare que celui qui s’est mis en colère est un assassin et que celui a convoité une femme dans son cœur a commis un adultère.

En radicalisant le commandement, Jésus met ses interlocuteurs en impasse pour les sortir de leur propre justice. Une fois qu’il est clair qu’on n’est pas juste, nous pouvons entendre l’appel à vivre par la grâce et à se poser la question : comment être disciples malgré ses colères, ses désirs troubles et ses richesses.

3e thème : Que faire de nos richesses ? 

À nous qui sommes riches, la grande question que pose ce texte est celle de notre relation à l’argent. Quelles sont les richesses qui sont un frein dans notre service du Christ ? On dit habituellement que l’argent est un bon serviteur et un mauvais maître, le problème est que lorsque nous voulons en faire notre serviteur, il a tendance à devenir notre maître.

Puisque nous sommes sur le chemin qui le conduit à la croix, nous pouvons relever que celui qui a tout donné et qui s’est fait pauvre est le Christ lui-même : Lui qui était riche, il s’est fait pauvre à cause de vous, pour que, vous, par sa pauvreté, vous deveniez riches (2 Co 8.9). C’est parce qu’il n’avait rien, qu’il a enrichi le monde comme personne, c’est parce qu’il a tout donné qu’il est devenu le sauveur du monde.  Comme le dit une liturgie : Tu t’es abaissé et tu nous as élevés, tu t’es fait pauvre et tu nous as enrichis, tu as été prisonnier et tu nous as libérés.

Une illustration : Des richesses au centuple

Lorsque Jésus se retrouve seul avec ses disciples, il console ses disciples en leur disant : Amen, je vous le dis, il n’est personne qui ait quitté, à cause de moi et de la bonne nouvelle, maison, frères, sœurs, mère, père, enfants ou terres, et qui ne reçoive au centuple, dans le temps présent, maisons, frères, sœurs, mères, enfants et terres. Maître Eckhart a expliqué ce verset de la façon suivante : « J’ose dire que celui qui, pour Dieu et pour la Bonté, laisse son père et sa mère, son frère, sa sœur ou quoi que ce soit, reçoit le centuple de deux façons. La première est que son père, sa mère, son frère et sa sœur lui deviennent cent fois plus chers qu’ils ne l’étaient auparavant. La seconde est que non seulement cent parmi les êtres humains, mais tous les êtres humains, du seul fait qu’ils sont des êtres humains et des gens, lui deviennent incomparablement plus chers que ne lui sont naturellement chers son père, sa mère ou son frère. »

L’épître aux hébreux du dimanche 13 octobre

Hé 4.12-13 – La parole comme une épée 

Le contexte – L’épître aux Hébreux

Dans son message adressé à des judéo-chrétiens, l’auteur de l’épître encourage ses interlocuteurs et les appelants à ne pas abandonner la fidélité.

S’adressant à des personnes qui connaissent bien l’histoire d’Israël, il commence par montrer en quoi Jésus est supérieur à Moïse, puis il les invite à ne pas imiter l’attitude des Hébreux au désert qui se sont révoltés contre leur conducteur et qui, de ce fait, n’ont pu entrer en terre promise. 

« Aujourd’hui, si vous entendez ma voix, ne vous obstinez pas comme au jour de la révolte, au jour de l’épreuve dans le désert. » Cette parole vient d’un Psaume qui fait référence à Moïse et qui est actualisé pour les lecteurs de l’épître.

L’aujourd’hui de Moïse est relu par le psalmiste, puis par l’épître aux Hébreux avant de s’adresser à notre propre aujourd’hui.

Que dit le texte ? – L’épée de la parole

Cette parole qui nous interpelle est comme une épée à double tranchant qui juge des sentiments et des pensées du cœur. La parole de Dieu devient le trébuchet à partir duquel nous pouvons peser nos pensées et nos actions.

Il peut nous arriver de mentir à nos voisins, parfois même à nos proches, voir à nous-mêmes, mais la parole est vérité, c’est elle qui pose sa lumière sur notre histoire et on ne peut mentir à la parole.

La pente sur laquelle nous nous trouvons tous nous conduit à aligner Dieu sur nos pensées et nos idées, la Parole est cette référence extérieure qui nous dit un Dieu avec lequel on ne peut tricher, un Dieu qui vient nous contester lorsque nous sommes menacés par l’orgueil, nous rassurer lorsque sommes assaillis par la peur et nous interpeller lorsque nous nous enfermons dans notre petit confort égoïste. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – L’homme riche

Lorsque Jésus dit à l’homme riche de suivre les commandements : Ne commets pas de meurtre ; ne commets pas d’adultère ; ne commets pas de vol ; ne fais pas de faux témoignage ; ne fais de tort à personne ; honore ton père et ta mère… ce dernier a le sentiment de sa propre justice : il vit en conformité avec la parole de Dieu. Pour lui la Parole n’est pas une contestation, mais une confirmation qui le justifie dans sa petite vie bien rangée. Lorsque nous avons apprivoisé la parole, elle devient tranchante : Va, vends tout ce que tu as, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans le ciel. Puis viens et suis-moi.

Ce petit épisode nous rappelle qu’on n’en a jamais fini avec la parole qu’on ne peut enfermer dans son petit conformisme spirituel. 

Le livre des Proverbes du dimanche 13 octobre

13.10.2024 : Pr 3.13-20 – Éloge de la sagesse 

Le contexte – Le livre des Proverbes

La sagesse est universelle et les spécialistes ont relevé des parallèles entre certains proverbes et les recueils de sagesse d’autres traditions. Israël a eu la sagesse d’écouter la sagesse des autres pour retenir ce qu’elle avait de meilleur. 

Dans le passage proposé à notre méditation, la sagesse est précieuse et belle. Elle est si importante que le livre en vient à confesser qu’elle est créatrice depuis la fondation du monde (v. 19). Placée au commencement du monde, nous sommes invités à l’inscrire au commencement de notre histoire et de nos journées. 

Parce qu’elle est fondatrice, elle donne du poids et du sens à chacune de nos vies. 

Que dit le texte ? – Le vrai bonheur

Dans ce passage, la sagesse s’assimile à l’intelligence. Dans la Bible, l’intelligence n’est pas innée, elle se cultive. Paul commence la partie pratique de l’épître aux Romains en appelant ses lecteurs au renouvellement de leur intelligence (Rm 12.2). L’intelligence dont il est question ici n’est pas l’intelligence rationnelle, mais l’intelligence de Dieu afin de comprendre sa volonté et d’ajuster son comportement à ses paroles. 

Un verset du chapitre précédent appelle à chercher la sagesse comme on cherche de l’argent. De même qu’on place son argent pour gagner de l’argent, on doit cultiver la sagesse pour récolter plus de sagesse, soigner son intelligence pour être plus intelligents. 

La sagesse est comme un arbre de vie et celui qui la cultive est déclaré heureux : il reçoit la promesse d’une longue vie (la longueur de jours) et d’une vie épanouie : richesse et gloire.

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – La vraie richesse

Lorsque le livre des Proverbes dit que la sagesse est plus précieuse que l’or, il nous invite à ne pas nous tromper de richesse, car la logique de la sagesse s’oppose en tout point à celle de l’argent. Dans l’histoire du jeune homme riche de l’évangile de ce dimanche, l’argent empêche l’interlocuteur de Jésus de le suivre, car il est prisonnier de ses richesses. 

Si la logique de l’argent a tendance à nous enfermer sur nous-mêmes, la logique de la sagesse nous ouvre sur Dieu et sur notre prochain. 

Cultiver la sagesse, entretenir l’intelligence de Dieu, nous conduit à voir le monde comme Dieu le voit et à considérer notre prochain comme un frère à aimer et à soutenir et non comme un concurrent. En cela la sagesse n’est pas une obéissance servile, mais une ouverture qui donne de l’espace à nos vies et nos relations. 

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenants : Antoine Nouis, Laurence Belling