L’évangile du dimanche 31 décembre

Luc 2.22-40 – Présentation de Jésus

Introduction

Les premiers hommes qui se sont inclinés devant Jésus sont les bergers. Les suivants sont Syméon que la tradition reconnaît comme un vieillard et Anne, une veuve. Des bergers, un vieillard, une veuve… l’évangile est reconnu par les petits.

Les premiers versets de l’évangile de Luc se passent dans le temple de Jérusalem lorsque Zacharie assume ses fonctions de prêtre et la première chose qui est dite de Jésus après sa naissance et qu’il a été présenté au temple. Jésus s’émancipera de la religion du temple, mais il est né dedans, il est totalement incarné dans une tradition. Ce passage fonde la déclaration de la Samaritaine dans le quatrième évangile : « Le salut vient des juifs. » (Jn 4.22)

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

La consécration des premiers-nés

Les parents de Jésus accomplissent le rite de consécration des premiers-nés prescrit par la Torah dans les livres de l’Exode, du Lévitique et des Nombres.

Cette coutume s’inscrit dans les lois plus générales des prémices qui consistent à offrir à Dieu la première part de ses récoltes, de ses troupeaux, de ses enfants. Offrir à Dieu la part est le signe que nous reconnaissons que tout ce que nous possédons vient de lui. Consacrer son premier-né est une façon d’inscrire l’ensemble de sa famille sous le regard de Dieu.

Un juste appelé Syméon

Syméon est le nom du deuxième fils de Jacob, il signifie = Dieu a entendu ou Dieu a écouté. Parce Syméon était un homme d’écoute, l’Esprit saint était sur lui. Ce qui qualifie la foi, ce n’est pas tant la certitude que l’écoute comme l’a dit Paul dans l’épître aux Romains : « La foi vient de ce qu’on entend » (Rm 10.17). Certes pour écouter, il faut croire qu’il y a quelque chose à entendre, mais il faut aussi reconnaître qu’on ne sait pas tout, qu’on a encore beaucoup à apprendre.

Syméon n’était pas juste et pieux parce qu’il savait tout, mais parce qu’il n’a pas cessé d’écouter. Du coup, quand il a vu le bébé Jésus dans les bras de ses parents, il ne s’est pas trompé : il a su.

Pistes d’actualisation

1er thème : De l’avent à Noël 

Le v.25 dit de Syméon qu’il attendait la consolation d’Israël : parce qu’il attendait, il a vu. Dans la même veine, le v.38 dit qu’Anne parlait de l’enfant à tous ceux qui attendaient la rédemption de Jérusalem.

Le thème de l’attente est celui de l’avent. Dans ce verset, l’attente s’accomplit… dans un bébé âgé de quelques semaines accompagné par de parents pauvres puisqu’ils ne peuvent offrir qu’une paire de tourterelles et deux colombes pour racheter leur enfant.

L’Évangile de Noël et que nous attendions Dieu dans la gloire et dans la grandeur et il vient au-devant de nous dans la fragilité d’un enfant. Nous n’avons jamais fini de méditer le paradoxe de cette annonce.

2e thème : Le particulier et l’universel

Le second personnage qui a accueilli le bébé est une veuve dont le texte dit qu’elle avait quatre-vingt-quatre ans. Une des interprétations est que quatre-vingt-quatre est le produit de douze pas sept. Douze est le nombre d’Israël et sept représente l’ensemble des nations. Notre récit se situe à l’articulation du singulier – le temple de Jérusalem – et de l’universel lorsque Syméon dit dans sa prophétie que Jésus est le salut « que tu as préparé devant tous les peuples, lumière pour la révélation aux nations » (2.31-32)

Dans le Nouveau Testament, le thème de l’ouverture à toutes les nations est le grand thème du ministère de Paul qui a été l’immense théologien qui a pensé cet élargissement.

À L’origine, l’évangile de Luc et les Actes des Apôtres formaient un seul livre, comme une grande fresque qui commence dans le temple de Jérusalem et qui se termine à Rome.

3e thème : Jésus un signe de contestation 

Après avoir annoncé que Jésus porterait le salut de Dieu devant pour les peuples, Syméon évoque le mode opératoire : Il sera comme un signe qui provoquera la contradiction et Marie sera transpercée par une épée.

Parce que Syméon était juste et pieux, il savait que le monde ne recevrait pas l’enfant. Comme le dit le prologue de l’évangile de Jean que nous avons médité le jour de Noël : « La lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres n’ont pas pu la saisir » (Jn 1.5). Ce refus de recevoir la lumière préfigure la croix qui sera une épée dans le cœur de Marie. L’évangile de l’enfance s’inscrit déjà dans le tragique.

Ce thème nous interroge aujourd’hui : l’Évangile est-il encore un signe de contestation, et de quoi ? S’il ne l’est plus, est-ce par ce que notre monde est totalement chrétien ou parce que nous n’avons édulcoré le scandale de l’évangile ? La réponse est dans la question.

Une illustration

Syméon était juste et pieux et Anne avait quatre-vingt-quatre ans et participait à la vie du temple par des jeûnes et des prières. Parce qu’ils étaient en Dieu, imprégnés de Dieu, ils ont reconnu dans le bébé Jésus le sauveur du monde.

Syméon et Anne n’ont pas eu besoin de la visite particulière d’un ange, ils ont su dès qu’ils ont vu. Une foi accomplie ne repose pas sur des signes spectaculaires, c’est un travail sur soi qui voir le monde et les gens comme Dieu les voient.

Dans un de ses livres, Christiane Singer raconte : « Certaines rencontres sont inoubliables – ce vieil homme dans un train qui, lorsque j’avais quinze ans peut-être, me mit sur le gril en me racontant qui j’étais, avec une exactitude presque insoutenable ″Comment savez-vous tout cela ?″ lui demandai-je en torturant les franges de mon châle. Et lui avec un sourire amène : ″Mais, mademoiselle ! Vous voyez bien que je suis vieux !″ »

L’épître du dimanche 31 décembre

24.12.2023 : Hé 11.8-19 – Les hommes de foi du Premier Testament 

Qu’est-ce que la foi ? 

Le contexte – La nouveauté radicale de l’Évangile

L’épître aux Hébreux parle d’un nouveau grand prêtre, d’un nouveau sanctuaire et d’une nouvelle alliance. L’objet de l’épître est de présenter la radicale nouveauté apportée par le Christ qui surpasse l’Ancienne Alliance.

Si la Première Alliance est dépassée, elle est aussi honorée par l’évocation du parcours de plusieurs hommes de la Genèse. Les versets du passage que nous avons lu parlent de la foi d’Abraham et de Sara.

Que dit le texte ? – La réalité de ce qu’on espère

Le premier verset du chapitre définit la foi en disant qu’elle est la réalité de ce qu’on espère, l’attestation de choses qu’on ne voit pas (Hé 11.1).

Avoir la foi, c’est faire le pari de la confiance et de l’espérance. Mais la foi n’est pas la garantie que les promesses vont se réaliser dans notre temps puisque le texte dit : C’est selon la foi que tous ceux-là sont morts, sans avoir obtenu les choses promises ; cependant ils les ont vues et saluées de loin, en reconnaissant publiquement qu’ils étaient étrangers et résidents temporaires sur la terre (Hé 11.13).

Si nous prenons le cas d’Abraham, il est parti au nom de la promesse d’une terre et d’une descendance et au soir de sa vie, il n’a qu’un enfant de la promesse et la seule terre qu’il a possédée est la grotte dans laquelle il a enterré sa femme Sara. En outre il a reçu l’annonce que ses enfants seront immigrés dans un pays qui n’est pas le leur et qu’on les affligera quatre cents ans (Gn 15.13).

À vue humaines, tous ces hommes du Premier Testament ont vu beaucoup moins que ce qui leur était promis et pourtant aujourd’hui, nous savons que la promesse faite à Abraham est vraie : ses descendants sont innombrables sur la terre et ils habitent dans toutes les nations. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Anne et Syméon dans lignée des humains de foi

Anne et Syméon ont vu la réalisation de la promesse qui leur avait été faite et ils ont eu les yeux de la foi pour la voir dans le nourrisson d’un couple de pauvres.

Ils ont vu l’enfant et cela leur a suffi. Ils ont eu l’assurance que Dieu n’abandonnait pas son peuple.

Même s’ils n’avaient pas vu Jésus, il aurait gardé la foi car elle est l’attestation des choses qu’on ne voit pas.

Même si on ne voit pas, il faut rester fidèle car le temps de Dieu n’est pas celui de nos impatiences. 


Le Premier Testament du dimanche 31 décembre

31.12.2023 : Gn 15.1-6, 21.1-3 : Renouvellement de l’alliance

L’annonce faite à Abraham

Le contexte – Quand la promesse se fait attendre

Dieu a appelé Abraham à quitter la terre de son père au nom d’une promesse de bénédiction : Je ferai de toi une grande nation et je te bénirai (Gn 12.2).

Abraham et parti et il a connu bien des aventures. Il a rencontré la famine, l’exil en Égypte, il a combattu une coalition de rois cananéens, mais les années ont passé et il n’a toujours pas d’enfant. Il en a tiré une leçon : c’est son serviteur qui héritera de sa maison.

C’est alors que Dieu le rencontre une nouvelle fois pour répéter sa promesse.

Que dit le texte ? – La sortie du destin pour entrer dans la vocation

Le Seigneur se présente comme le bouclier d’Abraham et lui annonce que sa récompense sera grande. Face à l’incrédulité de son serviteur, Dieu le fait sortir hors de sa tente et lui propose de contempler le ciel et de compter les étoiles s’il le peut : personne ne le peut.

Un très beau commentaire rabbinique met dans la bouche de Dieu les mots suivants : « Peut-être est-il écrit dans les étoiles qu’Abram n’aura pas d’enfants, et bien dans ce cas, je change ton nom : tu ne t’appelleras plus Abram, mais Abraham et Abraham aura un fils, Abraham aura une descendance aussi nombreuse que les étoiles qui se trouvent dans le ciel. »

Abraham a grandi dans une civilisation dont la religion cherchait à décrypter l’avenir dans l’observation des astres. En lui rappelant cette ancienne pratique, Dieu l’appelle à sortir de la croyance à une quelconque fatalité pour entrer dans une démarche de confiance, il le conduit à sortir du destin pour entrer dans sa vocation. 

Le dernier verset de la première partie dit qu’Abraham mit sa foi dans le Seigneur et que ce dernier le lui compta comme justice. La justice d’Abraham est qu’il a cru au-delà du raisonnable. Comme l’a dit Paul dans l’épître aux Romains : Espérant contre toute espérance, il a cru et il est ainsi devenu le père d’une multitude de nations (Rm 4.18).

Abraham a espéré, mais il a encore attendu et ce n’est que six chapitres plus loin que Sara fut enceinte et donna un fils à Abraham dans sa vieillesse (Gn 21.2).

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – les justes

En proposant à notre méditation ce texte de la Genèse, le lectionnaire fait le rapprochement entre le personnage d’Abraham et ceux d’Anne et Syméon.

Un psaume dit : Les yeux du Seigneur sont sur les justes, et ses oreilles sont attentives à leurs appels au secours ; et un peu plus loin : Nombreux sont les malheurs pour le juste, mais de tous le Seigneur le délivre (Ps 24.16,20). Nous savons que ce n’est pas toujours vrai et qu’il y a des justes qui ne sont jamais délivrés, mais nous devons le croire de toutes nos forces pour persévérer dans les voies de la justice. Abraham, Anne et Syméon ont attendu un grand âge avant de voir la réalisation de leur attente.