Installée dans un bâtiment datant de 1791, l’Église du Bouclier témoigne de l’Évangile en dialogue avec le monde contemporain. Son approche protestante moderne entend faire honneur à l’esprit calviniste en conjuguant culture et théologie.

Constituer la communauté de demain, c’est l’ambition de l’Église réformée du Bouclier à Strasbourg, héritière de la première paroisse francophone établie par Jean Calvin en 1538 (1). Aujourd’hui située dans le célèbre quartier de la Petite France, la paroisse voit en effet ses origines remonter aux tous débuts de la Réforme. Fraîchement expulsé de Genève, Jean Calvin arrive en 1538 à Strasbourg à la demande de Martin Bucer, pasteur et réformateur de cette ville libre d’Empire passée à la Réforme dès 1524. Calvin, venu pour enseigner à la nouvelle Haute-École, se voit charger de l’accompagnement pastoral des protestants francophones qui se réfugiaient à Strasbourg pour fuir les persécutions. Le réformateur ne restera que trois années mais celles-ci furent déterminantes pour poser les bases et définir les fondamentaux de la première paroisse réformée.

« L’Église réformée du Bouclier est l’héritière de cette première communauté d’exilés », raconte Fabian Clavairoly, pasteur avec Pierre Magne de la Croix, de cette paroisse. Et nos deux pasteurs de continuer aujourd’hui de fonder les bases de la communauté de demain comme Calvin l’a fait en son temps. Cela passe, notamment, par l’accompagnement de la jeunesse. « C’est une volonté affichée du Conseil presbytéral et donc l’un des piliers de notre vie paroissiale. Pour ce faire, nous avons mis en place des moyens humains et financiers afin d’adapter l’accompagnement spirituel en perspective de cette ambition », soulignent de concert Pierre Magne de la Croix en charge de son ministère depuis 2007 et Fabian Clavairoly arrivé en 2013 (tous deux sont issus de l’Église protestante unie de France).  Soit plus de 250 jeunes, des plus petits (pour lesquels sont organisés des « cultes à quatre pattes ») aux plus grands, qui font partie intégrante des activités du Bouclier (2).

Une histoire d’engagement

Ainsi, au-delà des activités traditionnelles de catéchisme, la paroisse organise six camps par an : des Vosges à la Suisse, de l’Écosse aux Cévennes en passant par le Togo. Dans chaque camp, un pasteur, voire deux, ou des membres du Conseil presbytéral. Le cahier des charges des postes pastoraux stipule d’ailleurs que chaque pasteur doit avoir le BAFD (Brevet d’Aptitude aux Fonctions de Directeur) et pour le reste de l’équipe, le BAFA (Brevet d’Aptitude aux Fonctions d’Animateur) est obligatoire (financement offert par la paroisse si besoin). En matière d’encadrement, le Bouclier dépasse les quotas imposés par la loi : pour un camp de ski par exemple, la loi stipule qu’un animateur pour douze jeunes est obligatoire. La paroisse en « recrute » quant à elle entre six et dix. « Nous souhaitons que les jeunes puissent s’inspirer de plusieurs modèles », précise Fabian Clavairoly. De jeunes paroissiens qui reçoivent à chacun de leur anniversaire jusqu’à l’âge de 18 ans (254 en 2019), une carte personnalisée, riche d’une réflexion théologique, de la part d’Elisabeth Christiansen, paroissienne de longue date au Bouclier.

Plus tard, après leur confirmation, la paroisse demande à ces jeunes de s’engager à leur tour. « Nous cherchons à leur faire comprendre qu’ils ont beaucoup reçu au cours des dernières années et qu’ils peuvent à leur tour donner aux plus jeunes, poursuit Fabian Clavairoly. C’est pourquoi, chaque année, de nombreux jeunes s’engagent pour animer l’école biblique ou des camps de jeunes. Cette responsabilité importante les valorise et contribue à leur donner confiance en eux. »

L’appartenance à la communauté du Bouclier se traduit également par l’organisation d’une vie collective bien dense adressée aux quelque 1 200 membres accueillis : cinéma, chant, concerts, conférences, débats, repas festifs, voyages, randonnées, ateliers de réflexion … autant d’activités, de rencontres derrière lesquelles la théologie n’est jamais bien loin (2). Une diversité qui permet à Pierre Magne de la Croix et Fabian Clavairoly de calibrer l’offre théologique en fonction de la demande : « Beaucoup commencent par venir chanter, écouter un concert ou participer à une rencontre tout en restant sur le seuil de l’église. Nous devons donc nous adapter à l’évolution de notre société en créant le lien entre vie communautaire et spiritualité », observent ces derniers. Et Pierre Magne de la Croix de préciser que « la rencontre de la théologie avec notre monde contemporain reste très présente lors des séances de catéchisme pour adultes (15 à 30 personnes à chaque fois) qui se déroulent une fois par mois avant le culte. » Au programme cette année, « la Cimade », « Karl Barth », « Jacques Ellul », « Zwingli » ou encore  » Qu’est-ce qu’une théologie protestante libérale ? « .

Autre dimension importante : la musique ; toujours en droite ligne avec Calvin qui était convaincu que le chant assurait la mise en valeur de la Parole. Le Bouclier compte deux chœurs, l’un regroupant 80 personnes et l’autre, les Gospels Friends, avec une trentaine de choristes. « La musique est très importante dans cette région où la culture musicale est forte, des plus petits aux plus grands. Nous avons la chance d’avoir un très bel orgue, de facture récente puisqu’arrivé en 2007 », explique Pierre Magne de la Croix.

Quant à la dimension sociale, l’Entraide protestante, à Strasbourg, n’est pas rattachée à une église mais constitue une institution à part à laquelle participent toutes les paroisses. Ce qui permet à la diaconie protestante strasbourgeoise d’occuper une place prépondérante. Mais de cela, nous reparlerons plus tard.

  • Église réformée du Bouclier à Strasbourg (UEPAL) : 4, rue du Bouclier – 67000 Strasbourg. 03 88 75 77 85. Pour mémoire, l’UEPAL compte environ 80% de Luthériens et 20% de Réformés.
  • lebouclier.fr ou www.lebouclier.com