« La Normandie accueille la Réforme très tôt, avec beaucoup de ferveur. On compte notamment de forts contingents protestants au Havre dès le 16ème siècle », peut-on lire sur les pages du Musée Protestant (museeprotestant.org). De fait, les thèses de Luther seront connues dans la région peu après 1530. Et le courant calviniste y fera de nombreux adeptes. Le port du Havre, qui a fêté ses 500 ans en … 2017, fut même un enjeu dans les guerres de religion françaises au 16ème siècle. Par la suite, en dépit des vicissitudes de l’histoire protestante française, la présence protestante a perduré dans ce port, notamment après l’édit de tolérance (1787), lorsque les communautés protestantes ont commençé à se réorganiser. Au 19ème siècle, la construction navale, l’arrivée du chemin de fer, le négoce des denrées tropicales (café, coton, chocolat …), le début des voyages transatlantiques et le développement du tourisme balnéaire, font faire du Havre l’un des plus grands ports français. Un dynamisme qui explique l’arrivée de nombreux protestants venus d’Europe du Nord, ou d’Alsace après la guerre de 1870. Le temple actuel de l’Eglise protestante unie du Havre fut construit en 1862, rue Anatole France en plein cœur du centre- ville (1). Bombardé en 1941, ce temple perdit son fronton, son clocher et sa toiture mais fut reconstruit en 1953 dans un style sobre, comme il sied souvent à l’architecture protestante (2). L’orgue Gutschenritter remplace l’ancien orgue Merklin, construit en 1883, détruit lors des bombardements.

Vérité et Fondamentalisme

« Le Havre, Montivilliers et Etretat sont regroupés dans un même ensemble paroissial, explique Emmanuel Rouanet, pasteur, au même titre que Marion Heyl, de cette paroisse. Notre Eglise est diverse comprenant des courants libéraux, traditionnels, voire piétistes. Au Havre, le protestantisme s’est ainsi développé dans toutes les couches de la société. » A signaler que la ville compte de nombreuses églises protestantes, membres ou pas de la Fédération Protestante de France, parmi lesquelles : l’EpudF, l’Armée du Salut, l’Eglise Adventiste, l’Assemblée de Dieu, l’Eglise apostolique (Assemblée Chrétienne Vie Nouvelle), l’Eglise la Bonne Nouvelle (Communautés et Assemblées Évangéliques de France – CAEF) et d’autres églises issues de l’immigration africaine.

Arrivés respectivement en 2012 et 2013, nos deux jeunes pasteurs trentenaires, unis devant l’Eternel, occupent là leur premier poste. La paroisse compte environ 700 familles. En ce qui concerne les jeunes, le catéchisme se déroule en lien avec d’autres paroisses du consistoire de Haute-Normandie, en l’occurrence Lillebonne, Bolbec et Fécamp. Un groupe de jeunes post catéchisme, environ une quinzaine, est allé à Rome l’été dernier. En perspective, un voyage au Liban afin que les jeunes puissent aller à la rencontre des Chrétiens d’Orient et découvrir les différentes actions menées au Liban en faveur des réfugiés syriens (parrainage, accueil …). Un projet de la région Nord-Normandie de l’EpudF en lien avec l’association AMEL, ONG libanaise, et l’église protestante de Beyrouth.

Autrement, afin de fédérer toutes les générations, la paroisse et son conseil presbytéral ont mis en place, il y a environ deux ans, des cultes pour tous, des enfants aux adultes les plus âgés, autour d’une thématique annuelle. Après la fraternité l’an passé, l’année en cours est dédiée à la cohérence entre paroles et actes. Une belle ambition illustrée par quatre cultes qui se déroulent au rythme des saisons, en septembre, à Noël, en mars et en juin. « Ces cultes permettent aux uns et aux autres d’apprendre à se connaître, d’avoir un temps d’échange autour du texte biblique. La prédication est remplacée par une animation biblique pendant laquelle les paroissiens se retrouvent par groupes d’une dizaine de personnes durant 30 à 40 minutes », raconte Marion Heyl. Autre activité importante, celle de l’Entraide de la paroisse qui permet, entre autres, de distribuer tous les quinze jours 370 colis alimentaires essentiellement à des migrants en cours de demande d’asile.

L’EpudF du Havre s’intègre par ailleurs dans le groupe interreligieux de la ville. « Ce groupe existe depuis une vingtaine d’années, souligne Marion Heyl. Il regroupe les trois religions monothéistes et se réunit une fois par mois. Ce sont principalement les musulmans et les chrétiens car la communauté juive est peu représentée au Havre. » A chaque fois, un prêtre, un diacre, un pasteur évangélique, un pasteur de l’EpudF et un Iman se réunissent. Echanges et discussions à partir des textes bibliques et coraniques autour d’un thème, « Vérité et Fondamentalisme » cette année. « Nous comprenons mieux les convergences tout en acceptant les différences. Nous apprenons à mieux nous connaître et à échanger autour de thématiques qui nous tiennent à cœur », poursuit Marion Heyl. Du reste, depuis trois ans, les responsables religieux de ces différentes confessions se réunissent régulièrement pour garder et renforcer le lien entre responsables de communautés religieuses. C’est dans cet esprit qu’un événement festif s’est déroulé en 2017 dans le cadre des 500 ans du Havre. Les différentes communautés étaient invitées. « Il était important de vivre ces événements ensemble. Ce fut une belle occasion de rencontres. C’est pourquoi nous réfléchissons à une nouvelle manifestation de ce genre pour 2019 », se félicite Marion Heyl.

(1) Eglise protestante unie de France : 47 rue Anatole France – 76600 Le Havre. Tél : 02 35 42 52 26. www.facebook.com/epulehavreetretatmontivilliers

Le Havre : Temple, 47 rue Anatole France. Culte à 10h30 tous les dimanches

Montivilliers (76290) : Temple, rue du Temple. Culte une fois par mois.

Etretat (76790) : Temple, 66 rue Guy de Maupassant. Culte en juillet et août.

(2) Le temple fut reconstruit par les architectes Gaston Delaune, Jacques Lamy et Gérard Dupasquier travaillant dans le cabinet Auguste Perret.