La petite église d’Obersteinbach ne rassemble plus qu’une trentaine de fidèles toutes les six semaines. «Que vont devenir toutes ces églises ?», s’interroge Chrystelle Ullmann. Quand un ami allemand lui parle du réseau des Radwegekirche dans son pays, des églises étapes sur les pistes cyclables, l’octogénaire s’enthousiasme. «Même si nous ne sommes qu’une poignée, il y a mille choses à inventer», défend la paroissienne. L’Église protestante allemande, l’EKD, compte 440 églises inscrites dans l’initiative, partie de Suisse. La paroisse serait la première en France à rejoindre cette carte. L’idée tombe à pic, alors que les collectivités aménagent un tronçon de piste cyclable pour raccorder celle qui allait déjà de Strasbourg à Lembach jusqu’au Palatinat en passant par Obersteinbach.

Liées par l’Histoire

De part et d’autre de la forêt qui fait frontière, la paroisse française d’Obersteinbach et celle allemande de Ludwigswinkel ne pouvaient que s’associer au projet. Chrystelle Ullmann embarque le pasteur voisin dans la candidature au réseau des Radwegekirche. Au XVIIIe siècle, c’est depuis ce jeune village protestant que les premiers luthériens sont venus s’implanter à Obersteinbach, alors catholique. Dans les années 1970, un camp militaire américain a fait de la forêt une barrière infranchissable. «C’est l’opportunité de faire de cet espace de malheur un espace de paix», se réjouit Chrystelle Ullmann.

Anticiper l’avenir

«Il faut saisir toute occasion de rencontres, insiste-t-elle en se projetant. L’église sera un lieu ouvert.» La Maison des châteaux voisine, structure de Patrimoine d’ici, son association, offrira aux cyclistes tables, points d’eau et toilettes. Cinq octogénaires assureront des temps de présence dans l’église. Chrystelle Ullmann souhaite partager sa passion de l’Histoire locale. «J’ai envie de transmettre cette histoire de difficultés qu’on peut surmonter, comme la guerre de religions qui a sévi ici au XVIIIe siècle.» Elle entrevoit une chance de « trouver une nouvelle formule pour donner envie de dire Dieu», alors que l’époque est à «une recherche spirituelle latente ». « Nous pourrions proposer des récits bibliques plus méconnus, suggère-t-elle, pour que les gens emportent quelque chose au-delà du fascicule touristique. L’essentiel est que ce bâtiment soit revitalisé et serve à la parole de Dieu. Pour l’octogénaire, il est crucial d’anticiper l’avenir. «Pour l’ancienne génération, cela donne de l’espérance.»