Suite aux récentes déclarations du président de la République, et pour nourrir le débat sur « l’aide à mourir », nous republions cet entretien vidéo enregistré il y a un an (17 mars 2023).
Nadine Davous, médecin des hôpitaux et présidente d’un espace éthique hospitalier, aborde le sujet complexe et sensible des soins de fin de vie, de l’euthanasie et du suicide assisté, en mettant l’accent sur les considérations éthiques, les histoires personnelles et le cadre juridique en France. A ses yeux, l’important est d’accompagner les personnes dans leur parcours de fin de vie plutôt que de mettre délibérément fin à leur vie. D’après son expérience personnelle avec des patients qui ont exprimé le désir de mourir, de telles demandes ne sont pas toujours simples et peuvent parfois être un appel à l’aide ou un signe de désespoir plutôt qu’un véritable désir de mettre fin à sa vie.
Pour Nadine Davous, la loi Leonetti, qui régit les soins de fin de vie en France, ne doit pas être modifiée pour autoriser l’euthanasie ou le suicide assisté. Elle met en garde contre les pressions sociétales qui pourraient pousser à une vision plus utilitaire de la vie et de la mort, en soulignant les dangers de donner à la loi trop de pouvoir sur des questions aussi personnelles. Elle suggère que le cadre juridique actuel, qui autorise la sédation palliative dans les cas graves, répond de manière adéquate à la plupart des situations de fin de vie sans qu’il soit nécessaire de recourir à l’euthanasie ou au suicide assisté.
De nombreuses questions sont soulevées, notamment sur la manière dont la société et la profession médicale gèrent la complexité des soins de fin de vie, la valeur de la vie et la dignité de la mort. Le médecin appelle à une approche prudente et compatissante qui respecte les souhaits et les besoins des personnes confrontées à la fin de leur vie, tout en tenant compte des implications éthiques et juridiques plus larges.
Nadine Davous met l’accent sur les complexités éthiques et morales qui entourent l’acte de mettre fin à une vie, même dans le contexte de l’euthanasie ou du suicide assisté. Elle plaide pour le maintien de la position juridique actuelle, qui considère l’acte de mettre délibérément fin à une vie comme une transgression, même si, dans des circonstances exceptionnelles, elle n’est pas punie. Cette position nuancée est préférée à un cadre juridique qui normaliserait l’euthanasie ou le suicide assisté, ce qui risquerait de faire passer les valeurs sociétales du « tu ne tueras point » à une acceptation conditionnelle de la mise à mort.
Pour cette médecin protestante, il est l’importance de préserver le concept de transgression dans le contexte de la fin d’une vie, suggérant que même lorsque cela est fait par compassion ou par soin, cela reste un manquement éthique important. Cette position est ancrée dans une perspective philosophique et religieuse plus large qui valorise le caractère sacré de la vie.
En résistant aux pressions visant à légiférer positivement sur l’euthanasie ou le suicide assisté, Nadine Davous estime que la société peut maintenir une frontière morale qui respecte la vie tout en reconnaissant les réalités complexes des soins de fin de vie. Elle appelle à maintenir l’acte de donner la mort dans le domaine de la transgression, soulignant la gravité de telles décisions et la nécessité d’une approche prudente et compatissante qui concilie les désirs individuels et les considérations éthiques.
Le débat sur la fin de vie soulève des questions importantes sur la manière dont les sociétés valorisent la vie et la mort, sur le rôle de la loi dans la réglementation des décisions de fin de vie et sur les responsabilités éthiques des individus et des professionnels de la santé dans ces moments profondément personnels.
Production : Fondation Bersier- Regards protestants
Réalisation : Horizontal pictures
Intervenante : Nadine Davous