Contre toute attente, l’indépendant pro-européen Nicușor Dan a remporté le second tour de l’élection présidentielle en Roumanie, qui s’est tenu le 18 mai, avec 54 % des voix. Ce résultat marque un tournant dans un scrutin marqué par les tensions, les manipulations numériques et les craintes d’un basculement autoritaire.
Initialement prévue en novembre 2024, l’élection a été avancée à la suite d’un événement inédit : l’annulation du premier scrutin par la Cour constitutionnelle. En cause, une manipulation massive des réseaux sociaux, notamment TikTok, ayant favorisé l’ascension fulgurante de Călin Georgescu. Ce candidat de droite, inconnu du grand public quelques semaines avant l’élection, s’est imposé par un discours pro-russe et nationaliste, inquiétant les voisins européens. Son influence, bien qu’évincée juridiquement, s’est poursuivie par l’intermédiaire de son successeur, encore donné favori peu avant le second tour.
La victoire de Nicușor Dan n’était donc pas écrite. Elle s’explique par un regain de participation (+10 % au second tour), traduisant une mobilisation citoyenne inédite. Des figures comme le théologien Ovidiu Gardos ont même fait le déplacement exprès pour voter.
Ce retournement est perçu par certains analystes comme un soulagement à l’échelle européenne. À l’instar de la situation en Pologne, où s’opposent un candidat populiste de droite et un libéral pro-européen, la Roumanie devient un laboratoire politique. L’opposition entre projets démocratiques et autoritaires semble désormais structurante pour de nombreux scrutins sur le continent.
Mais certains experts appellent à dépasser cette lecture binaire. Le politologue Christel Ngambi évoque un « faux dilemme » entre candidats pro-démocratiques et figures antidémocratiques, invitant les électeurs, notamment chrétiens, à chercher une « troisième voie », fidèle aux valeurs de liberté, égalité et état de droit.
À l’aube des prochaines échéances électorales européennes, les cas roumain et polonais rappellent qu’aucun pays n’est à l’abri, mais que rien n’est non plus inéluctable.
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Remerciements : Christel Ngiambi
Entretien mené par : David Gonzalez
Technique : Quentin Sondag