14.08.2022 : Luc 12.49-53 – Jésus, cause de division
Le grâce et la sel
Introduction
Dans l’épître aux Colossiens, L’apôtre Paul salue ses interlocuteurs en disant : Que votre parole soit toujours accompagnée de grâce, assaisonnée de sel (Col 4.6). Dans l’évangile, Jésus a prononcé des paroles de grâce, mais aussi des paroles de sel.
Ce texte parle de feu et de divisions, autant dire que ce n’est pas le passage de l’Évangile qui est habituellement médité pendant les semaines de l’unité au cours desquelles on se lamente sur la division entre les Églises.
Et s’il changeait notre regard en considérant que parfois il est des déchirures qui sont fécondes. Dans l’histoire, la séparation entre les Églises a parfois été des occasions de dynamisme et de renouvellement dans la ferveur des Églises.
Points d’exégèse
Attention sur deux points.
Titre : Le bon et le mauvais feu
Je suis venu mettre un feu sur la terre. Dans le Nouveau Testament, nous trouvons un bon et un mauvais feu. Le mauvais feu est celui que les disciples veulent faire tomber sur un village de Samaritain (Lc 9.54). Jésus les a rabroués.
Un autre feu apparaît à plusieurs endroits. Il évoque le baptême lorsque Jean dit que Jésus baptisera dans l’Esprit saint et le feu (Lc 3.16). Et il évoque la Pentecôte au cours de laquelle l’Esprit s’est manifesté comme des langues de feu qui se sont posées sur les disciples. Nous retrouverons ces deux références dans notre lecture de ce récit.
Titre : Les divisions dans la famille de Jésus
Cinq dans une maison seront divisés, trois contre deux et deux contre trois. Jésus a souvent été critique avec les familles. Il a été sévère avec sa mère et ses frères lorsqu’ils ont cherché à le ramener à la maison (Lc 8.19-21), il appellera celui qui veut le suivre à le préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants (Lc 14.26), à quitter pour le règne de Dieu maison, femme, frères, parents ou enfants (Lc 18.29).
Ces versets nous rappellent que si les familles sont des lieux de solidarité et d’amour tellement importants dans un monde hostile, elles peuvent aussi être des refuges égoïstes et identitaires.
Pistes d’actualisation
1er thème : Jésus facteur de division
Les paroles de Jésus sont parfois apaisantes, mais elles peuvent aussi être tranchantes. Les paroles les plus tranchantes n’ont pas été prononcées face aux pécheurs ou aux publicains, mais face aux religieux qui dénaturent le message de l’Évangile.
Nous pensons au récit de l’expulsion des marchands du temple lorsque Jésus a dénoncé la machine religieuse qu’était devenu le temple au profit d’une caste de religieux (Lc 19.45-48). Nous pensons aussi à sa diatribe contre les scribes et les pharisiens (Mt 23), ou à son procès lorsqu’il a refusé de répondre aux accusations qui étaient portées contre lui car il ne voulait pas cautionner une parodie de justice.
Le sage Qohéleth a dit qu’il y avait un temps pour déchirer et un temps pour coudre (Qo 3.7). Ces deux temps sont dans l’évangile.
2e thème : Le feu du baptême de la croix
Après avoir annoncé qu’il est venu mettre le feu sur la terre, Jésus parle du baptême qu’il doit recevoir, lui qui baptise dans l’Esprit saint et le feu, sauf que le baptême dont il est question ici est celui de la croix.
La croix nous parle du feu de Dieu, mais non pas d’un feu qui détruit les pécheurs, mais d’un feu qui le détruit lui-même. La fournaise de la croix, c’est l’engagement d’un Dieu qui préfère périr pour ses ennemis que de les brûler.
Le feu est un jugement, mais c’est un jugement que subit Dieu lui-même pour le salut du monde.
3e thème : Du bienfait des divisions
Après le baptême, l’autre référence au feu est le récit de Pentecôte au cours duquel chaque des humains présents ont entendu la parole de l’Évangile dans sa langue maternelle, c’est-à-dire la langue de son intimité, la langue qui le définit comme un être unique.
À propos de l’Esprit, le père de l’Église Basile de Césarée a écrit : « C’est la même eau fraîche et féconde qui tombe sur le champ afin que fleurissent rouge le coquelicot, rose la rose et bleu le bleuet. » Autrement dit, l’Esprit attise les différences. Les divisions sont simplement la marque de nos différences et elles peuvent être fécondes. Il ne faut pas avoir peur des divisions, il faut simplement chercher à les vivre d’une manière apaisée. Cela est vrai entre les Églises et dans les Églises, mais aussi les familles, les communautés et tous les regroupements humains.
Une illustration : Le feu du jugement
Paul utilise l’image du feu pour évoquer le jugement de Dieu. Il compare une existence à une maison construite avec des matériaux nobles (l’or, l’argent, les pierres précieuses) et avec des matériaux vils (le bois, le foin, le chaume). Le jugement de Dieu est comme un feu qui brûle tout ce qui n’a pas besoin d’être éternisé pour ne conserver d’une vie que ce qu’il y avait de meilleur en elle.
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenant : Antoine Nouis