Fin septembre 2017, Emmanuel Macron avait tenu un premier discours sur l’Europe à la Sorbonne. Le président de la République avait alors fixé ses grandes orientations européennes et présenté une série de propositions pour relancer le projet européen, notamment la création d’une véritable défense commune. Jeudi 25 avril, il a prononcé un nouveau discours devant les ambassadeurs des autres États membres de l’Union européenne, la délégation de la Commission européenne en France, des chefs d’entreprise, des étudiants et des chercheurs. Les eurodéputés français avaient également été conviés, mais comme le rappelle Le Monde, ceux-ci étaient retenus par la dernière session plénière du Parlement européen avant les élections européennes. “Notre Europe aujourd’hui est mortelle. Elle peut mourir et cela dépend uniquement de nos choix”, a souligné le chef d’État, qui a aussi évoqué les valeurs de la “démocratie libérale”, “de plus en plus critiquées et contestées”.

Après avoir dressé le bilan des accomplissements européens, parmi lesquels “des réussites, en particulier en matière d’unité et de souveraineté, ce qui n’était pas acquis”, Emmanuel Macron a évoqué la pandémie de Covid-19 et la réponse à l’agression russe de l’Ukraine. Le président de la République a admis toutefois que l’Europe n’avait “pas tout réussi”. Craignant “à l’horizon de la prochaine décennie” que l’Europe ne soit fragilisée, il a listé ses propositions pour faire mieux.

Défense et migration

Dans le domaine de la défense, Emmanuel Macron verrait d’un bon œil la création d’une Europe qui “se fait respecter”, “assure sa sécurité” et reprend “son autonomie stratégique”. Dans ce but, il compte inviter les Européens à bâtir une “initiative européenne de défense” comprenant “peut-être” un bouclier antimissile européen. Il s’est également dit favorable à la création d’une “capacité européenne de cybersécurité et de cyberdéfense”. Un nouvel “emprunt européen” permettrait de financer l’effort de défense, en prenant le soin d’acheter en priorité du matériel militaire européen.

Appelant l’Europe à “retrouver la maîtrise de [ses] frontières pleinement, entièrement et [à] l’assumer”, le président de la République a également proposé une “structure politique” sur les sujets de la migration, de la sécurité. Celle-ci servirait enfin à lutter plus efficacement contre la criminalité organisée et le terrorisme.

Intelligence artificielle, décarbonation

Quid de l’économie ? Emmanuel Macron souhaite voir l’Union européenne devenir, d’ici à 2030, un “leader mondial”. Pour atteindre cet objectif, il trouve indispensable qu’elle se dote de “stratégies de financement dédiées”, dans cinq “secteurs stratégiques de demain” : l’intelligence artificielle, l’informatique quantique, l’espace, les biotechnologies et les “nouvelles énergies” que sont l’hydrogène, les réacteurs modulaires et la fusion nucléaire. Pour ce qui est de “la défense” et du “spatial”, le chef de l’État souhaite inscrire dans les traités communautaires “la préférence européenne”. Il a aussi appelé à réviser la politique commerciale européenne car la Chine et les États-Unis ne “respectent plus les règles du commerce telles qu’elles ont été écrites il y a quinze ans”.

Chantre de l’intégration dans les missions de la Banque centrale européenne d’“un objectif de croissance, voire un objectif de décarbonation”, Emmanuel Macron est favorable “à un nouveau choc d’investissement commun, un grand plan d’investissement budgétaire” pour la défense, l’intelligence artificielle, la décarbonation. Selon lui, il faut doubler “la capacité d’action financière” de l’Union européenne.

Discours de haine

Autre point clé du discours du Président, son souhait de voir passer la majorité numérique dans l’Union européenne à 15 ans. En dessous de cet âge, il juge qu’un “contrôle parental” de l’accès aux réseaux sociaux est nécessaire. “Là où nous interdisons les propos racistes, les propos antisémites, les discours de haine, nous devons les interdire dans l’espace numérique, où la présomption d’anonymat conduit à la désinhibition de la haine”, a-t-il expliqué.

Emmanuel Macron a, enfin, défendu un “humanisme européen”. “Être européen, c’est pas simplement habiter une terre de la Baltique, de la Méditerranée ou de l’Atlantique à la mer Noire, c’est défendre une certaine idée de l’homme qui place l’individu libre, rationnel et éclairé au-dessus de tout”, a-t-il détaillé, avant de défendre la “conditionnalité” des aides européennes au respect de l’État de droit. Avant de prendre congé de l’assemblée, le chef de l’État a montré du doigt les nationalistes. Il les accuse de vouloir rester dans “l’immeuble” européen sans “payer le loyer” ni respecter les “règles de copropriété”.