Son nom figure dans tous les médias, à l’approche de la rentrée politique. Médine, rappeur de 40 ans, fascine et cristallise les tensions entre les Verts. Le parti Europe Ecologie-Verts (EELV) et la France insoumise (LFI) l’ont invité parmi les têtes d’affiche de leurs universités d’été, jeudi 24 et samedi 26 août.

Mais ces invitations n’ont pas été du goût de la majorité, ni de la droite et de l’extrême-droite. À la mi-août, le ministre délégué à l’économie Roland Lescure a déjà annoncé qu’il ne viendrait pas aux Journées d’été des Verts. Pressenti pour donner un mot de bienvenue, l’ancien Premier ministre Edouard Philippe ne se déplacera pas non plus, comme l’indique Le Monde.

La venue de Médine divise aussi dans les rangs des écologistes. Le 21 août, deux maires EELV, Jeanne Barseghian à Strasbourg et Pierre Hurmic à Bordeaux, ont choisi de bouder cette rentrée politique. La députée européenne Karima Delli a reproché à sa formation d’inviter un « vecteur du confusionnisme politique qui sévit dans la période », tandis que l’ancien candidat à la présidentielle Noël Mamère reproche aux Verts de donner raison « à ceux qui nous haïssent ».

La controverse du Bataclan

L’un des tweets récents de Médine a alimenté la controverse, début août. Il a qualifié l’essayiste Rachel Khan, juive et petite-fille de déportés, de « resKHANpée », et a été accusé d’antisémitisme. Mais le rappeur n’en est pas à sa première polémique.

Son nom – tiré d’une des villes saintes de l’islam – fait déjà beaucoup parler à l’automne 2018. Médine est alors programmé sur la scène du Bataclan, la salle de concert où a eu lieu l’attaque djihadiste du 13 novembre 2015. Des élus de droite et d’extrême-droite réclament avec vigueur l’annulation de la venue du rappeur, car ils considèrent que plusieurs extraits de son album entachent la mémoire des victimes.

Affublé d’une barbe, Médine s’insurge des discriminations envers les musulmans et s’attaque au concept de laïcité à la française dans Jihad, le plus grand combat est contre soi-même. Certains extraits de sa chanson Don’t Laïk sont mis en avant pour justifier les accusations, tels que « Crucifions les laïcards comme à Golgotha ».

Des amitiés et des regrets

Une partie du passé de Médine ressort ensuite dans les médias. Le journal Marianne voit ainsi en lui une personnalité ambiguë : très engagé dans des luttes de gauche, le rappeur se rend en 2014 à la fête de l’Huma juste après avoir participé à une réunion organisée par Kémi Seba. Cet activiste suprémaciste noir prône la « séparation raciale » entre les Noirs et les Blancs.

Médine affiche aussi pendant longtemps son soutien à l’ex-humoriste Dieudonné, accusé d’antisémitisme et proche de l’activiste d’extrême-droite Alain Soral. Certaines de ses chansons accusent pourtant Eric Zemmour ou encore Marine Le Pen de créer la division.

Marianne estime aussi que Médine brouille les pistes sur sa vision de l’islam. Il critique les musulmans qui pourraient être tentés par le jihad guerrier, et dans le même temps, il se présente comme un ambassadeur actif de l’association controversée « Havre de savoir ». Elle s’inscrirait dans le courant de pensée très conservateur des Frères musulmans, selon plusieurs chercheurs.

Médine n’a pourtant de cesse de réfuter les accusations dont il fait l’objet. Il évoque des erreurs, regrette son ancienne amitié avec Dieudonné et certaines charges contre la laïcité, de même qu’il refuse de qualifier son tweet sur Rachel Khan d’antisémite. Sincère ou pas, le rappeur n’a sans doute pas fini de faire parler de lui.