Synopsis : Cristi, un inspecteur de police de Bucarest corrompu par des trafiquants de drogue, est soupçonné par ses supérieurs et mis sur écoute. Embarqué malgré lui par la sulfureuse Gilda sur l’île de la Gomera il doit apprendre vite le Silbo, une langue siflée ancestrale. Gâce à ce langage secret, il pourra libérer en Roumanie un mafieux de prison et récupérer les millions cachés. Mais l’amour va s’en mêler et rien ne se passera comme prévu…

Après un certain nombre de longs métrages d’art et d’essai (dont 12h08 à l’est de Bucarest, Police, Adjective et The Treasure) qui ont été acclamés dans les festivals et même distribués en salles au-delà de la Roumanie dans certains cas, l’auteur-réalisateur Corneliu Porumboiu change de style avec Les siffleurs une coproduction franco-roumaine-allemande qui se déroule non seulement à Bucarest, la ville natale de Porumboiu, mais aussi sur l’île canarienne de La Gomera et même à Singapour. Une histoire très divertissante et dense à la fois, d’un flic qui double son département et les gangsters avec qui il est de mèche.

Certains passionnés du réalisateur pourront se sentir un peu déconcertés par ce changement par rapport aux longues prises de vues et au critère de production de ses premières productions dans l’esprit de ce que l’on qualifie de Nouvelle Vague roumaine. Cependant, la préoccupation récurrente de Porumboiu pour la langue et sur l’héritage du régime répressif de Nicolae Ceaușescu est toujours là, mais abordée sous un autre angle. 

Au cœur de l’intrigue, cet ancien langage sifflant de La Gomera, aussi connu sous le nom d’El Silbo Gomero, que le policier Cristi (Vlad Ivanov à Porumboiu) va devoir apprendre de ses nouveaux associés mafieux espagnoles afin d’éviter la surveillance de ses collègues policiers. Un système de communication qui remonte à plusieurs générations, ce type de sifflement permettant de cartographier les voyelles et les consonnes de l’espagnol sur des hauteurs de sifflement particulières. Le bruit peut être assez fort pour être entendu à des kilomètres à travers un ravin montagneux sur une île volcanique ou, comme il est intelligemment déployé plus tard, d’un bloc d’immeubles à un autre à Bucarest.

Les différents personnages se jaugent constamment les uns les autres, mais à aucun moment, personne ne semble prendre véritablement le dessus, et grâce à la structure non linéaire, nous aussi, sommes conduits à chercher de rassembler les divers indices. Jusqu’au bout, le suspense demeure, rendant difficile de savoir qui double qui, et comment tout cela va se terminer, ce qui fait finalement aussi l’un des charmes du film.

L’ensemble est tout à fait agréable, rafraîchissant et intelligent. Un bon moment de cinéma dans ce 72ème Festival de Cannes.